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Legend of the Mountain

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les avis de Cinemasie

5 critiques: 4.2/5

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11 critiques: 3.98/5



Arno Ching-wan 4.25 Po Yeh Po Lo Mi
drélium 4 Pas son meilleur mais tellement unique
jeffy 4.25 Tellement à part
Ordell Robbie 4.5 une perle et un King Hu très influent
Anel 4
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Po Yeh Po Lo Mi

J'adore la magie dans les films. Arriver à rendre crédible le grand n'importe quoi à coup de jeux d'acteurs concernés, de mise en scène inspirée et de fond sonore adéquat, j'admire. Le final tellurique de Gojoe, l'hystérie de l'Exorciste chinois, les climax de la série anime Mononoke ou même l'ambiance chamanique d'un Renne blanc, je signe. Ce dernier est finlandais, certes, mais le visage de la grande Hsu Feng affiche parfois des airs lapons troublants (on trouve une petite contribution génétique asiat' chez eux, si, si) . Qu'est-ce que c'est fun ! Et païen, d'une certaine façon, merci.

Ce jour, 40 ans après la sortie du film, je découvre cette Légende de la montagne. Je l'ai joyeusement arpentée avec ce moine. 20 bonnes minutes de marche pour l'atteindre, la montagne. Ailleurs, on balancerait trois plans, trois paysages différents, et en moins d'une minute trente ce serait plié. Chez King Hu, on se tape 20 put... de minutes de marche ! Est-ce ennuyeux ? J'étais d'humeur. Ca accompagne bien le déconfinement. C'est zen, bucolique, beau et le son sacrément bien agencé. Musique, puis pas du moine, puis vent dans les feuilles, puis re-musique, puis re-pas du moine... Tout est composé, rythmé. De fait, lorsqu'on arrive au temple, on ressent à quel point ce lieu est isolé. Elle n'est pas gratuite, cette balade anti-stress, même si l'on peut parfois se demander si la découverte de A Touch of Zen en 1975 n'encouragea pas son auteur à cibler par la suite un public international attiré par la folkore chinois. Tout comme le fera Tsui Hark d'ailleurs (qui lui s'amusera aussi avec le taoisme dans CGS et défoncera volontiers l'église bouddhiste dans Green Snake) et même Zhang Yimou, aux films à l'aspect "duty free" autrement plus appuyés.

Ma meilleure scène se trouve au milieu. Le long affrontement au tambour entre la démone et le taoïste m'a (presque) mis en transe, un état auquel mon esprit est beaucoup plus fermé qu'autrefois. Tout y est encore parfait, et gageons qu'un Na Hong-Jin récita ses classiques dans son très efficace The Strangers. Il en avait aussi le droit car The Legend (...) fut tourné en Corée du sud, comme le souligne Drélium. L'anecdote pèse son poids : il est étonnant que des oeuvres chinoise si fortes (avé "Raining (...)") aient été tournées ailleurs que dans ce si grand pays. Le climax de The Legend (...) est moins fou que ce à quoi je m'attendais, et cassé par un flashback en trop, mais la romance portée par Sylvia Chang continue d'émouvoir et les vignettes fantastiques font encore mouche. Les deux fantômes dans l'auberge créent encore leur petit effet, quant à cette tête coupée par terre à la fin, elle évoque les passages glaçants d'un Evil Dead. Tout ceci confère à cette Legend (...) un statut de grand film fantastique tout court, qu'il ne faut pas hésiter à désolidariser parfois de la filmo du maître pour le faire jouxter celle d'un autre. Kobayashi avec Kwaidan, par exemple.

20 juin 2020
par Arno Ching-wan




Pas son meilleur mais tellement unique

Tourné en même temps et au même endroit (un temple en montagne de Corée du Sud) que Raining in the mountain, Legend of the Mountain reprend la majorité du cast de Raining et chacun y tient un rôle pourtant bien différent comme par goût du jeu.(1)

Film assez déroutant qui dans sa première partie s'échappe très souvent pour errer dans la nature, flaner au grand air, regarder les fleurs et les insectes en guise de métaphores amoureuses. King Hu observe la beauté grandiose des lieux au gré du périple de son héros, à grands renforts de plans magnifiques mais aussi étrangement montés parfois, avec une certaine naïveté proche du documentaire nature qui atteste d'un tournage plus rapide au milieu du planing de "Raining...". Le lettré préféré (1) de King Hu cherche un coin tranquille pour traduire ses sutras sacrés. Son ignorance, son calme naturel et son esprit cartésien l'aideront beaucoup à ne pas perdre la tête car à défaut de tranquilité, c'est plutôt une brochette de personnes toutes plus étranges et secrètes les unes que les autres qu'il va devoir apprivoiser. Elles semblent seules à habiter ces montagnes, douées pour la plupart du pouvoir de disparaître dans un nuage de fumée et sont adeptes du tambour incantatoire ou de la flute magique. Lorsque les choses s'éclaircissent finalement, le film part subitement et définitivement vers la légende fantastique avec confrontations et incantations d'un autre monde à la clef.

Préfigurant avec une avance insolente les chinese ghost story de Tsui Hark et autres histoires de fantômes, Legend of the mountain est un film unique par son traitement, mais qui semble tiraillé entre la contemplation et la pure folie fantastique. La première partie installe une atmospshère de mystère où certains moments semblent assez vides et inutilement contemplatifs. Ils ne sont là que pour créer une fracture et préparer l'aboutissement à venir, survolté lui. Une démarche propre à King Hu, alchimiste de la quiétude et du mouvement, qui trouve ici un peu plus difficilement la voix de la limpidité avec un rythme étrange et un scénario assez vite ficelé, qui s'attarde beaucoup sur la contemplation pour terminer en bloc par un combat spirituel unique assez hallucinant compte tenu du début du film tellement posé et réaliste, bien qu'étrange aussi à sa manière. C'est aussi cette sensation d'insaisissable, accompagnée d'une musique envoûtante et de mélopées incantatoires aussi mystérieuses pour le spectateur que pour le héros, qui fait de Legend of the mountain un film définitivement à part.
Le fond de l'histoire et la profondeur générale semblent moins importants que la beauté du plan et afaiblissent un peu la qualité de l'ensemble tout de même. Le relief thématique des meilleurs King Hu manque à transcender le tout et à opérer l'union parfaite entre le film de genre et le film méditatif.

(1) Petit point sur le cast :

Exceptées l'actrice fétiche de King Hu, Hsu Feng, qui reprend plus ou moins son rôle ambigü de "Raining...", plus sournoise encore puisqu'elle se révèle être une véritable experte en incantations obscures, et Sylvia Chang qui affiche une beauté à tomber par terre pour l'un de ses premiers rôles (elles sont du reste toutes deux majestueuses), le reste du cast est chamboulé comparé à Raining. L'acteur fétiche de King Hu, Shih Chun, reprend son personnage de lettré de Touch of Zen, héros malgré lui que le spectateur suit tout au long de l'aventure avec le même point de vue incrédule. Tien Feng y joue un fou dépenaillé au lieu du notable très classieux de "Raining...", tandis que Tung Lam joue lui le notable au lieu du moine dépenaillé. Ng Ming Choi et Chan Wai Lau endossent des rôles de moines taoïstes défenseurs du bon droit au lieu d'être des coquins comme dans Raining alors que Wu jia Xiang joue un un pauvre voyageur au lieu du grand maître shaolin. Plutôt étonnant pour deux films assez proches.



17 février 2005
par drélium




Tellement à part

Ce film est aux wu-xia-pian ce que la musique de Bruckner est à la musique classique, maîtrisé, travaillé, mais d'une beauté tellement travaillée qu'on pourrait la croire artificielle et qu'elle en devient quasi hypnothique. L'étirement des plans dans la durée confère toute sa spécficité au film, on est à la fois subjugué, lassé, envouté et exaspéré par ce rythme au tempo aussi lent mais qui distille à merveille la saveur des images.

Il suffit de n'importe quel documentaire naturaliste pour nous faire voir la nature telle qu'elle est, mais King Hu nous présente une nature telle qu'elle apparaît à l'homme, c'est à dire avec toute la symbolique qu'elle porte, avec le pouvoir suggestif que seul l'art peut conférer. L'histoire elle-même n'a ici que peut d'importance, ce qui compte c'est ce qui est représenté. Le parallèle entre King Hu et Goethe semble ici évident et les versets de Faust pourraient magnifiquement être mis en exergue de Legend of the Mountain: "Tout ce qui passe n'est que symbole, l'ineffable ici devient acte..."

Une forme d'art à coup sûr qui peut ne pas plaire à tout le monde.

23 août 2004
par jeffy


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